"Que suffit-il ?" Introduction (3)
Nous vivons une époque formidable ! En ce monde marqué hier par la pandémie, alors que l’Europe renoue avec la guerre et que la conscience climatique s’éveille, un nouveau souffle traverse la société occidentale :
- la loi reconnaît aux entreprises une raison d’être autre que le profit, qui ne suffit plus
- nos jeunes cherchent du sens dans leur vie professionnelle : un job ne suffit pas
- ils construisent des tiny houses et préfèrent le car sharing : plus c’est trop
- les gens confinés par la peur ont tous les jours applaudi en héros les acteurs de services quotidiens en reconnaissant leur valeur vitale : des ‘petits riens’ indispensables
- ne pouvant plus consommer beaucoup ils ont pris conscience de l’inanité de bien des achats, tendent vers une sobriété heureuse : moins c’est mieux
- ne pouvant plus se déplacer ils ont plus envie de dodo que de métro pour assurer leur boulot, et le télétravail à temps partiel devient parfois une évidence : pour quoi plus ?
- bien des managers veulent orienter autrement l’économie vers la création de valeur(s) pour les parties prenantes et viser des impacts positifs et régénératifs : plus de bien pour plus de gens
- nos gouvernants prônent la sobriété et ont mis la valeur - économie, après les valeurs - santé : ça suffit ?
- nous mettons les valeurs de fraternité et l’égalité avant la liberté : la plupart des administrés ont obéi en un clin d’œil à des consignes liberticides en rupture totale avec leurs aspirations précédentes, …
En même temps (sic) la guerre a repris en Europe, des millions de jobs ont été à l’arrêt pendant les mois de pandémie, des milliers d’entreprises ne survivent pas, des milliers de ‘jeunes’ démissionnent ou lèvent le pied, les canicules et inondations soulignant le climaticide sont avérées, les animaux disparaissent, les entrepreneurs cherchent des solutions ‘sobres’ sans savoir où ni comment … Tout ça ne suffira pas : et si on bâtissait une suite ensemble ?
J’ai envie de regarder le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide (pas vous ?) : j’entends beaucoup parler de transition, de solidarité, de résilience, de colibris. Depuis quelques temps le buzzword est « sobriété ».
Mais la question « à moitié vie ou à moitié plein » est-elle la bonne ? J’y préfère la suivante : le verre contient-il assez d’eau par rapport au vrai besoin ?! Si oui, il est deux fois trop grand. Sinon, remplissons-le. S’agit-il d’un tour de passe-passe, comme le faisait dire Coluche au politique « Dites-moi de quoi vous avez besoin, je vous expliquerai comment vous en passer ! » ? Pas tout à fait : « la » bonne question à se poser me semble
« Que suffit-il pour répondre aux vrais besoins des personnes concernées ? »
Depuis presque 20 ans, j’observe dans les entreprises l’émergence de démarches basées sur la recherche du sens : objectif, utilité, finalité, service à rendre, but, vision … jusqu’à afficher leur ‘raison d’être’, recommandée même par le patron d’un des plus gros fonds d’investissement du monde[1] ! Et en parallèle la recherche continue d’économies, réduction des coûts, minimisation des ressources … Schizophrénie ? Destruction créatrice Schumpetérienne ?
Et si on arrivait à définir pour chaque personne, chaque professionnel et pour chaque projet, à chaque niveau de l’entreprise, ce qui suffit pour répondre aux vrais besoins de chacun, aujourd’hui et demain. Mais comment ?
Et si ce raisonnement permettait de tout améliorer : produits, services, organisations, process, systèmes d’information, business model, gouvernance, collectivités, territoires … ?
Le Value(s) Design, évolution des méthodes Valeur(s) présentées dans l’ouvrage collectif « Valeur(s) & Management »[2], ‘nouvelle’ façon de penser non-cartésienne systémique[3], propose une démarche et des outils basés sur 2 questions et 1 principe présentés plus loin[4].
Mais avant de vous l’exposer, je préfère vous le faire toucher du doigt sur un exemple du quotidien, puis vous raconter des histoires plus professionnelles …
> Les exemples sont indiqués dans les pages qui suivent par le signe > et écrits en italique. Ceux qui sont anonymisés présentent des projets que j’ai eu l’honneur d’accompagner. D’autres sont mes réactions à des récits présentés par d’autres. Même si les chiffres et mots sont modifiés pour des raisons de confidentialité, tous sont réels !
En grisé, les outils du raisonnement Valeur(s) et du Value(s) Design que vous pourrez appliquer à vos projets. Pour plus de facilité d’application future, ils sont repris à la fin de l’ouvrage (voir « Pour VOS projets : … »)
[1] « As I have written in past letters, a company cannot achieve long-term profits without embracing purpose and considering the needs of a broad range of stakeholders.” In “Letter to CEOs” by Larry Fink, Chairman of Blackrock https://www.blackrock.com/corporate/investor-relations/larry-fink-ceo-letter
[2] Valeur(s) & Management : des méthodes pour plus de valeur(s) dans le management» , Olaf de Hemmer Gudme & Hugues Poissonnier, Ed° EMS 2017
[3] « La théorie du système général », Jean-Louis Le Moigne, Collection «Systèmes-Décisions», 1977
[4] Le raisonnement Valeur(s) , la méthode de Value(s) Design et quelques-uns de ses outils sont présentés dans ces pages en grisé et repris à la fin de l’ouvrage (voir « Pour VOS projets : … »)
